Monsieur,…

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012-9791

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912

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Monsieur,

Le Comité régional de lutte contre les espèces exotiques envahissantes (EEE) de l’Abitibi-Témiscamingue est inquiet de voir l’orientation que prend la province de l’Ontario dans le cadre de la révision de la Politique stratégique relative à la gestion des appâts de l’Ontario. Selon le comité, des éléments de cette politique vont à l’encontre de la réglementation adoptée récemment au Québec. Cette lettre vise donc à présenter les commentaires et recommandations du comité dans le cadre de la consultation publique.

À l’ouest du Québec, la rivière des Outaouais fait office de frontière entre les deux provinces. Du côté québécois, la rivière des Outaouais correspond à la zone de pêche 25 et, du côté de l’Ontario, la zone de pêche 12. Pour alléger le texte, la rivière des Outaouais et ses zones de pêche provinciales seront libellées « zone 12/25 ».

Réglementation québécoise

Dans un souci de protection de la biodiversité, le gouvernement du Québec a convenu « qu’à compter du 1er avril 2017, il sera interdit d’utiliser des poissons appâts vivants partout au Québec. Par ailleurs, afin de réduire les risques de propagation d’espèces indésirables, le Ministère rappelle que les modalités annoncées en 2012, concernant l’interdiction d’utiliser des poissons appâts morts en période estivale sera également effective tel que prévu à compter du 1er avril 2017. Ainsi, seule l’utilisation de poissons appâts morts pour la pêche hivernale demeurera permise, et ce, dans les zones de pêche où la pratique de cette activité était déjà autorisée. » Changement proposé

Historiquement, la zone 12/25 a été traitée indépendamment des autres zones ontariennes, afin d’assurer une harmonisation des réglementations concernant la pêche entre les deux provinces. Malheureusement, la réglementation concernant l’utilisation des poissons appâts ne fait pas partie de cette harmonisation. L’Ontario s’apprête à regrouper les zones de pêche 10, 11 et 12 afin de créer la zone de gestion des appâts (ZGA) « D », selon la Politique stratégique relative à la gestion des appâts de l’Ontario.

Selon cette nouvelle nomenclature, « les appâts des zones ZGA A, D, E et F seraient autorisés dans la rivière des Outaouais (y compris le lac Témiscamingue) » (voir la figure 1, ci-dessus). Ainsi, des poissons appâts vivants provenant des Grands Lacs pourraient être pêchés commercialement, puis vendus et utilisés dans la zone 12/25.

Menace écologique

De l’avis du Comité régional de lutte contre les EEE de l’Abitibi-Témiscamingue, ce changement de réglementation menace directement la biodiversité, plutôt que de la protéger. Avec la proposition actuelle de découpage des ZGA et l’autorisation de transport des poissons appâts vivants telles qu’elles sont proposées, les menaces écologiques augmentent pour la rivière des Outaouais, principalement en ce qui concerne l’introduction d’EEE et de pathogènes.

En effet, on retrouve de nombreuses EEE dans les Grands Lacs et la nouvelle politique ontarienne permettrait de les transporter et de les utiliser pour la pêche dans la zone 12/25. Ainsi, des EEE (ex. carpe des roseaux) pourraient être utilisées, voire introduites, dans le lac Témiscamingue. Ces espèces, une fois implantées, sont impossibles à déloger et peuvent avoir de graves impacts sur les écosystèmes, les infrastructures et sur les activités de pêche et de plaisance. L’autorisation du transport et l’utilisation de poissons appâts vivants augmenteraient également les risques de transport de pathogènes vers la rivière des Outaouais.

Au Québec, les pêcheurs acceptent de grands sacrifices pour réduire le risque d’introduction d’espèces exotiques envahissantes et de maladies par l’usage et le transport de poissons appâts en respectant l’interdiction d’utilisation de poissons appâts vivants. Ces efforts sont moins significatifs dans les plans d’eau transfrontaliers si les appâts vivants sont permis du côté ontarien de la frontière.

De plus, l’augmentation du risque de contamination de la rivière des Outaouais rend vulnérable l’ensemble du bassin versant, en plus de nuire aux efforts du Québec en matière de gestion des poissons appâts. Rappelons que cet immense bassin versant occupe tout l’ouest de la province et compte certaines des plus importantes pêcheries du Québec.

Harmonisation interprovinciale

Il paraît complètement insensé que, sur un même plan d’eau transfrontalier, comme le lac Témiscamingue ou le lac Abitibi, des pêcheurs sportifs puissent utiliser des poissons appâts vivants du côté ontarien alors que d’autres pêcheurs, du côté québécois, ne peuvent même plus utiliser de poissons appâts morts, en saison estivale.

Ainsi, pour le Comité régional de lutte contre les EEE, il est primordial que la zone 12/25 demeure une zone distincte au niveau des zones de gestion de pêche et des appâts. De cette façon, cela permettrait de protéger la biodiversité de la rivière des Outaouais, tout en permettant d’uniformiser la réglementation de pêche avec poissons appâts pour les pêcheurs sportifs indépendamment du côté de la frontière où ils pêcheront. Une harmonisation interprovinciale sur la réglementation concernant la pêche et l’utilisation de poissons appâts dans la zone 12/25 est essentielle, dans un souci d’équité et de protection de l’environnement. À cet égard, il pourrait être pertinent de créer une seule zone unique à la rivière des Outaouais, de part et d’autre de la rivière, avec une réglementation harmonisée sur les pratiques et les usages, afin d’enrayer les ambiguïtés et faciliter la gestion et la protection de la rivière des Outaouais, de part et d’autre du cours d’eau. En cas d’impossibilité, il pourrait être pertinent de conserver, dans chaque province, une zone de gestion unique à la rivière des Outaouais, toujours dans un souci de protection et d’harmonisation.

Recommandation : Conserver une zone unique de gestion de pêche et de gestion des appâts pour la rivière des Outaouais, avec une réglementation harmonisée sur les pratiques et les usages des poissons appâts.

Recommandation : Interdire formellement la vente ou l’utilisation de poissons appâts vivants sur les plans d’eau transfrontaliers entre le Québec et l’Ontario.

En vous remerciant de l’attention que vous porterez à la présente et en espérant pouvoir compter sur votre collaboration, je vous prie d’agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.

Bianca Bédard

Chargée de projets au CREAT et coordonnatrice du Comité régional de lutte contre les espèces exotiques envahissantes de l’Abitibi-Témiscamingue.

[Original Comment ID: 209012]